dimanche 14 août 2011

Les petits riens à Tel Aviv_3 : Shouk et français ne font pas bon marché!

       En août, Tel Aviv est investie par les français. C'est bien simple, ils sont partout. Qu'ils déambulent sur la croisette, pullulent sur la plage ou mandibulent aux terrasses des restaurants, on ne voit qu'eux, et encore plus gênant, on n'entend qu'eux. Deviner le "juif parisien", à ses expressions désabusées ou aux mœurs vestimentaires frivoles, devient alors le jeu à la mode -et légèrement antisémite- pratiqué à la pause déjeuner ou lors des sorties nocturnes.

      Même le Shouk Hacarmel, l'endroit israélien par excellence, le saint des saints de Tel Aviv est envahi! Certes on y entend toujours les vociférations des marchands de fruits et légumes (Shéva bééser!! Shévaaa bééser!! yallah !), on y contemple encore les étalages d'épices, de gâteaux arabes ou les devantures des fromageries. Mais l'atmosphère est désormais lourde de bleu-blanc-rouge: on croise une bonne douzaine de compatriotes au mètre carré. Au mieux, ils cherchent à se fondre dans le décor à coup de kama zé holé, à l'accent prononcé ; au pire, ils ne font aucun effort et là ça donne du: "Maman, maman, attends moi, j'ai vu des tee-shirts trop pas chers!! File-moi 50 shekels, allez, steup-plaît", du "Allo t'es où? Nous au marché, ouais ouais c'est good mais c'est complètement bliiiindé.." du "On fait quoi ce soir? Chais pas j'suis crevé", ou du " Je kiffe le shouk" (la dernière phrase fait état d'un esprit à mi-chemin dans la typologie précédemment dressée, à savoir le français qui réinvestit son vocabulaire hébreux à la sauce francophone).

       Outre la perte d'exotisme qu'il engendre, ce cadre hexagonal imposé présente d'autres inconvénients.1.Une montée générale des prix , certes logique pour la pleine saison, mais surement stimulée par la frénésie du porte-monnaie de nos amis gaulois. 2. Une réduction considérable de la marge de négociation. Que vous la preniez ou pas, il la vendra cette casquette! 3. Une inclination croissante du vendeur israélien à vous entuber aux instants stratégiques de vos emplettes: à l'annonce du prix, de la pesée, et même à la remise de la monnaie. Il faut alors sortir les dents, bander les muscles, et débiter votre hébreux le plus pur afin d'épater le commerçant, et sauver quelques maigres agourot. A ce rythme, acheter trois légumes devient vite un sport éreintant et c'est kol kar épuisé que vous sortez du shouk, en maudissant ces maudits franç... et zut, c'est vrai que vous en êtes un également.
 



















samedi 6 août 2011

Le printemps en Israël ?


En Israël le mouvement de protestation se poursuit et prend de l'ampleur. Une manifestation hebdomadaire a lieu chaque samedi soir, depuis trois semaines. Aujourd'hui, elle rassemblait 300.000 personnes, plus du double de la semaine dernière. Est-il alors approprié de parler de printemps israélien ? Déjà les analystes se plaisent à joindre ce qui se passe en Israël aux bouleversements des pays arabes de la région. Certes, quelques-uns vous diront que toute comparaison est hors de propos: les évènements en Israël se déroulent de manière non-violente et n'ont pas (encore) fait de victimes. Surtout, les revendications sont d'ordre économique et ne prétendent pas au renversement d'un système autoritaire. Et oui, malgré les nombreux défauts qu'on peut lui alléguer, on doit bien admettre qu'Israël est (encore_bis) une démocratie. Pas de tank donc à Tel Aviv, mais le blocage aux voitures, organisé par la police, des principales artères empruntées par le cortège.

Printemps arabe et manifestations israéliennes, rien à voir donc? Pas si sûr. Les revendications, s'il est vrai qu'elles ont pour origine un sursaut purement économique dépasse aujourd'hui de simples demandes sur le pouvoir d'achat. Le mot d'ordre de ces derniers jours parmi les protestants, celui scandé dans les cortèges n'est pas moins que Justice sociale, we want social justice. Le champs des revendications s'est d'ailleurs étendu: ce qui a commencé par le prix du cottage et de l'immobilier atteint les domaines de l'éducation, des childcares, la question des subventions accordées aux orthodoxes, l'appartenance de la terre, etc.. Cette demande de justice sociale va main dans la main avec un esprit idéaliste proche de celui des premiers kibboutzim. Dans la « communauté des tentes » sont ainsi proposés divers services gratuits comme la coupe de cheveux, la pause café, ou le déjeuner. En son sein, on s'appelle déjà la nouvelle génération en marche, on enjoint l'ensemble de la société à la rejoindre. La société israélienne est d'une manière générale admirative et solidaire de la lutte engagée par ses jeunes, à l'image du nostalgique écrivain Amoz Oz, qui en appelle aux israéliens des années 50, les faiseurs d'un Etat. C'est, d'après lui, cette unité perdue, que quête avec courage et sagacité la jeunesse israélienne aujourd'hui.

En ce sens, on peut penser – espérer ?- que printemps arabe et récent bouleversement de la société israélienne partagent un point commun criant et crucial: ils sont tout les deux les appels pressants à un renouveau. Des événements d'une même essence, donc, ce qui, dans une certaine mesure, est une bonne nouvelle. Cela signifie qu'Israël est un acteur du Moyen-Orient à part entière et (presque) normalisé, étant à la fois l'objet et l'instigateur d'influences auprès des autres pays de la zone.