jeudi 13 octobre 2011

Quand le Hamas et Israël s'entendent

     La une des journaux en Israël est entièrement occupée par la prochaine libération de Gilad Shalit et de 1027 prisonniers palestiniens, après l'accord passé entre le gouvernement hébreu et le Hamas. En Israël et en Palestine, on se tient prêt à se réjouir, pas des mêmes choses bien sûr. Reste que la réaction des médias français et des commentateurs en tout genre est inquiétante. Outre l'erreur du Monde sur le nombre des palestiniens concernés par l'échange, l'analyse au lance pierre sur la réussite inopinée de la transaction, et les habituelles remarques purement antisémites et hors sujet, on a en règle générale aucun détail dans nos médias (version informatique) sur le récent accord et la discussion qu'il a nécessité, rien sur ses protagonistes (pourtant nombreux), à peine plus sur ses clauses et sa mise en oeuvre dans les prochains jours. Retour donc, avec objectivité (si tenté que cela soit possible), sur les déterminants du dernier (espérons-le) volet de l'affaire Shalit.

    La scène d'abord. Au Caire, table de discussion entre les représentants du Hamas (qu'on ne présente plus),  David Meidan, envoyé de Netanhayou et le Shin Bet, les services de Sécurité Générale israéliens. cette dualité du côté israélien a son importance: Meidan est parle au nom du gouvernement, il sait ce à quoi est prêt celui-ci pour obtenir gain de cause, quelles sont ses "red lines" et les points à valoriser dans la négociation. Shin Bet, représentée par son directeur Yoram Cohen, fournit l'information quant aux palestiniens concernés par l'accord. Son rôle est éminent stratégique, Y. Cohen prenant d'ailleurs la liberté de donner clairement  son avis sur le bien ou le mal fondé de la décision. Troisième opérateur israélien, les IDF, chargées de la mise en oeuvre de l'accord sur le terrain, autrement dit, de la récupération de Shalit auprès des autorités égyptiennes, et de la remise en liberté des détenus. Enfin le médiateur, en premier lieu l'Egypte, très active dans le nombre de propositions visant à franchir le gap restant entre les deux camps, et la délégation allemande dans une moindre mesure.

    L'accord ensuite. Rien que1027 palestiniens pour un juif israélien. En plus de ce déséquilibre du nombre, Israël a du faire deux autres concessions, qui faisaient partie de ses red lines jusqu'à récemment: libérer des arabes israéliens ainsi que certains détenus, anciens organisateurs d'actes terroristes, (faisant partie à ce titre de la liste des 125 des "non négociables"). Israël a cependant obtenu du Hamas une importante concession en échange: le non retour de la plupart de ces détenus en Cisjordanie mais expulsés vers Gaza ou vers l'étranger. C'est pourquoi l'accord paraît aux yeux de nombreux protagonistes du camps israélien, comme très acceptable, voir comme la meilleure opportunité obtenue depuis le début des négociations. Enfin, signalons qu'en vertu de la loi israélienne, l'accord doit être au préalable accepté par la société israélienne, puisque que chaque israélien dispose du droit de saisir la Cour Suprême contre sa mise en œuvre.


    L'analyse enfin. Chacun se gargarise de trouver des raisons évidemment politiques et sournoises, faisant Netanyahu digne de  Machiavel,  pour expliquer cet accord. On évoque un gouvernement israélien mis en difficulté par la "rue israélienne" à la recherche d'un regain de popularité, ou encore plus alléchant, la volonté d'Israël en concluant ce marché avec le Hamas d'affaiblir le Fatah d'Abu Mazen afin de miner sa démarche à l'ONU. Sans contester la pertinence de ces éléments, qui restent néanmoins discutables,  il me semble qu'on oublie à quelle point la dimension sentimentale est primordiale : Shalit est en captivité depuis plus de cinq ans (du jamais vu pour un prisonnier israélien détenu par le Hamas), on ne peut pas se promener dans une ville en Israël, sans rencontrer un portrait géant de lui, une affiche sur les murs, ou un tag sur un pylône avec comme toute légende free shalit ; sa famille ont dressé une tente de protestation en plein centre de Jérusalem, non loin de la residence du PM, dont la fréquentation n'a cessé de croitre au fil des mois. Cette libération était attendue d'une manière très forte par la société israélienne, Netanyahu n'avait peut-être pas le pouvoir et la marge de manoeuvre qu'on lui imputait dans cette affaire.

      Retour  en dernier lieu sur les éléments politiques évoqués précédemment.Pour penser que cet accord est une manoeuvre délibérée d'Israël pour mettre en difficulté Abbas, faut-il encore s'interroger sur l'intérêt d'Israël de voir le Hamas plus fort au détriment du Fatah, au risque même de le voir supplanter ce dernier  en Cisjordanie. Je vous dis franchement mon avis : Israël n'a aucun intérêt à cela. Des petits malins diront que si, car cela mettait fin à toute velléités de paix, que l'Etat sioniste se refuse bien sûr à concrétiser.  Je pense le contraire d'abord parce que la procédure à l'ONU, malgré tout ce qu'on écrit dessus, ne représente aucun danger direct et de court terme pour Israël. Ensuite, car sans même discuter de la volonté réelle d'Israël à faire ou ne pas faire la paix, on ne peut pas raisonnablement penser qu'Israël gagnerait à la fin de la coordination des politiques sécuritaires et économique avec l'Autorité Palestinienne au sein des territoires occupés, la montée des violences dans ces zones, et l'exposition accrue au terrorisme provenant de Cisjordanie, ces trois dernières propositions étant les conséquences probables d'une hypothétique prise de pouvoir du Hamas en Cisjordanie.

Que conclure? Restons prudent, bien sûr. On connaît mal d'abord l'ensemble des dimensions d'un tel accord, qui reste à être finalisé. L'accord a un double mérite: satisfaire l'attente angoissée de toute une société, améliorer le sort de palestiniens, sans augmenter de manière significative la menace terroriste pesant sur Israël.  Qu'on y réfléchisse avant de le dénoncer à grands cris. (NB: Nous n'avons pas discuter des raisons d'Israël de garder en captivité de nombreux palestiniens, souvent au mépris de la plus élémentaire justice. C'est un sujet, peu reluisant pour Israël, sur lequel il s'agit quand même de s'informer de manière réfléchie avant de porter toute opinion hâtive).













dimanche 9 octobre 2011

Yom Kippour, Tsom Kal ou bonne balade.

Hier à six heures résonnait le Shofar pour signaler la fin du Tsom, le jeûne en ce jour de Yom Kippour. Retour sur ces 25 heures assez spéciales en Israël, faites de privations et de...promenades à bicyclette.

Yom Kippour, comme chacun sait, c'est le jour du Grand Pardon devant être entièrement consacrer à la contrition afin d'expier ses fautes. Outre les cinq interdictions, - ne pas se laver, ne pas se frictionner le corps, ne pas porter de chaussures en cuir, ne pas manger ni boire, et ne pas s'aimer -, on passe sa journée à prier et lire les psaumes, en autre le Livre de Jonas, dont l'histoire est éloquente pour le thème du jour. Mais ce délicieux emploi du temps ne concerne qu'une partie de la population juive israélienne.

Car aujourd'hui, Yom Kippour, c'est un peu la fête du vélo pour la population séculaire. Aucune voiture ne roulant pendant toute la durée du Tsom dans les villes comme sur les autoroutes, c'est l'occasion rêvée d'aller essayer son nouveau VTT dans Nevet Tsedek ou se prendre pour Niv Libner sur la route de Haifa. Et si on est pas un fan de deux roues, on profite toujours du calme citadin, inexistant à Tel Aviv les 364 autres jours de l'année, pour se promener en famille. Les vieux installent leur table de Shesh Besh au beau milieu des carrefours et la veille, les enfants sont autorisés à jouer dans les rues jusqu'à une heure avancée de la nuit.

Alors, entre le cycliste et le pécheur en repentance, certains cherchent à trouver un juste milieu. Sans passer toute la journée à la syna, ils décident de se priver de nourriture, peut-être afin de ressentir eux aussi l'esprit de Kippour. Au final, c'est à chacun de choisir son attitude, son implication dans le jour saint. Une affaire de choix personnel donc ? Pas si sûr. Car en Israël, à chaque évènement du calendrier religieux, se pose de savoir à quel point l'État organise et règlemente la vie économique et sociale périphérique à la fête religieuse. Si à Yom Kippour, l'absence de trafic est entièrement due à la tradition et ne repose sur aucun décret (on rencontre d'ailleurs des voitures en circulation à Yaffo), on peut s'étonner en revanche de la loi obligeant les commerces et les restaurants à fermer. Israël se proclame comme l'État juif, mais à l'image d'une grand part de sa population, juive et détachée de la religion, savoir si l'État est religieux ou laïc reste ambigüe.



vendredi 7 octobre 2011

Reprise du blog, ! שנה טובה

C'est avec beaucoup de retard que je vous souhaite la Shana Tova! Une année 5772 que je vous souhaite pleine de réussite, de découvertes et de joie surtout. De nouveau en Israël pour quatre autres mois, je reprends ce petit blog sur la Terre Promise, sa société et ses contradictions. Et si je ne vous promets quant à moi ni la lune ni même une petite bande de terre à l'est de la Méditerranée, je vous garantis tout de même un programme chargé. Sujets à aborder parmi d'autres:
● Politique ; avec la poursuite des efforts pour la reconnaissance d'un état palestinien et la reprise des négociations.
● Social ; retour sur les revendications de l'été israélien et leur impact.
● Sociétal ; un petit tour à prévoir du côté des communautés ultra-orthodoxe et arabe. 
● Religion ;  de quoi découvrir entre Yom Kippour, Soukkot ou Hanouka.
● Culturel ;  si ce n'est pas déjà fait, il est tant pour vous de vous ouvrir à la musique israélienne.

Voilà, en espérant vous retrouver très vite sur ces pages ou à travers un de vos commentaires (dithyrambiques, cela va de soit) ; bon vent et bonne lecture.